La crise du coronavirus a bousculé le secteur du Tourise et, pour la seule année 2021, l’Organisation mondiale du tourisme (OMT) a évalué les pertes à 2 000 milliards de dollars à l’échelle planétaire.
Avant la pandémie du covid19, le secteur du Tourisme était en pleine expansion au Maroc. En 2019, le nombre d’entrées sur le territoire avait augmenté de 5,2 %,
En 2019, le tourisme représentait 11 % du PIB et 5 % des emplois au Royaume. Sur les 13 millions de touristes venus visiter le pays l’année précédant l’apparition du coronavirus, plus de 30 % étaient français, suivis par les Espagnols et les Anglais. Les recettes se chiffraient alors à 80 milliards de dirhams, contre 28 milliards seulement au début de 2021, soit une baisse de 65 % sur l’année 2020.
Aujourd’hui, par mesures de protection sanitaire, la fermeture des frontières du Royaume, entrée en vigueur le 29 novembre dernier, est prolongée jusqu’au 31 décembre minimum, sachant que, depuis le début de l’épidémie, le royaume a choisi de privilégier la santé, en adoptant une approche radicale et en se barricadant. Cette mesure, pour le moins drastique, de fermer l’ensemble des frontières du Maroc n’est pas bien comprise, voire mal acceptée par la population, mais elle est cohérente avec la stratégie de gestion de la pandémie adoptée par le Royaume depuis le début de la crise sanitaire en mars 2020.
Le Maroc a érigé ce “principe de précaution maximale, comme ligne de crête de son action contre le Covid-19. Et cette décision de suspendre tous les vols entrants et sortants afin de déployer un “bouclier” contre le nouveau variant et protéger les populations s’inscrit dans la continuité de cette politique, quoique le nouveau variant Omicron, qui serait plus contagieux que le variant Delta, n’est pas encore apparu au Maroc.
En fermant ses frontières, le Royaume, dont les indicateurs sanitaires sont encore au vert, espère surtout empêcher l’entrée du nouveau variant, qualifié par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) de
«préoccupant », ou tout au moins la retarder au maximum. Car le Maroc ne fera pas exception, le variant finira par y être détecté. Le risque d’une éventuelle contamination n’est pas à écarter.
Face à cette perspective, le Royaume a choisi d’ adopter une approche radicale en se barricadant, au risque de porter un coup fatal au tourisme, un secteur qui commençait à peine à sortir la tête de l’eau: « L’optimisme était revenu, il y a eu du monde pendant les vacances de la Toussaint, et déjà beaucoup de réservations pour les vacances de fin d’année.
Malheureusement, tout cela est parti en fumée », déplorent les opérateurs du secteur, ajoutant : » C’est terminé; le tourisme local ne peut rien changer au marasme. Les touristes locaux ne font tourner que l’hôtellerie, mais pas le reste de l’écosystème – guides, transporteurs, tour-opérateurs, etc. », se désolent les professionnels.
En fait , depuis 2020 déjà, les professionnels réclament des mesures pour étudier la crise et trouver des solutions protectionnistes.
Or, c’était compter sans l’arrivée de la cinquième vague du Covid-19 et l’émergence du variant Omicron, qui ont contraint le Maroc, le 25 novembre dernier, à suspendre ses vols, d’abord avec la France, avant de fermer totalement ses frontières aériennes et maritimes, alors que le Royaume avait mis en place un plan pour maintenir son attractivité, Cette annonce est venue perturber la stratégie des acteurs touristiques, qui pensaient voir enfin le bout du tunnel.
Dans une lettre datée du 29 novembre dernier, adressée au chef de gouvernement Aziz Akhannouch, le président de la Fédération nationale de l’industrie hôtelière (FNIH), Lahcen Zelmat, tire la sonnette d’alarme, affirmant : « En l’absence de mesures d’accompagnement urgentes et spécifiques, nous craignons une difficulté grandissante à envisager l’avenir de notre industrie. Toutes les réservations ont été annulées et la plupart des hôtels devront fermer, sachant que la moitié d’entre eux le sont depuis le début de la pandémie, en mars 2020 ».
Même son de cloche du côté de la Fédération nationale des agences de voyage du Maroc (FNAVM) qui affirme que « quelque 80 % des agences de voyages sont déjà à l’arrêt et les récentes décisions vont aggraver notre situation ».
Pourtant, l’optimisme était revenu après les chiffres encourageants du troisième trimestre de 2021 – 15,9 milliards de dirhams (1,5 milliard d’euros) de recettes –, même si ce montant reste inférieur de 40 % à ce que réalise en temps normal le Maroc sur cette période.
Lors de la présentation de son budget devant la commission des secteurs productifs – réalisée avant la nouvelle fermeture des frontières –, la ministre du Tourisme, Fatim-Zahra Ammor, avait annoncé une augmentation de 8 % du budget de son ministère, passé de 626,59 millions à 679,8 millions de dirhams, ce qui est jugé louable mais nettement insuffisant au regard de la baisse du nombre de touristes.
Pour faire face à la crise, Fatim-Zahra Ammor a récemment annoncé le retour de l’aide mensuelle de 2 000 dirhams, déjà mise en place au début de la crise sanitaire pour accompagner les salariés des entreprises en difficulté.
« La subvention ne sert qu’à rester debout le temps d’y voir un peu plus clair. Or, à l’heure actuelle, nous n’avons aucune visibilité », estime-t-on.
D’une manière générale, l’espoir d’une réouverture fait place aujourd’hui à une réelle inquiétude.
« La situation est catastrophique. Avec ces avalanche d’annulations de chambres d »hôtels, 75 % des établissements ont cessé leurs activités et la fermeture de l’aérien a tout compliqué. C’ est une catastrophe, on essaie de survivre, c’est tout », déplore-t-on » Seuls ceux travaillant avec le tourisme local ou accueillant des séminaires arrivent à s’en sortir et à éviter la fermeture ou le licenciement de personnel. Les professionnels du secteur espèrent limiter les dégâts en misant sur le tourisme interne pour les fêtes de fin d’année ».
D: Abdelhak BAKHAT