Le Maroc, pays de traditions millénaires, de valeurs enracinées, de spiritualité et de savoir-vivre, fait aujourd’hui face à une tempête d’un genre nouveau. Une crise qui ne frappe ni ses finances ni ses institutions, mais bien le socle même de son identité : sa morale collective. Et c’est à cité mythique au carrefour des cultures, que cette fracture se manifeste avec une acuité troublante.
Un fléau qui est aujourd’hui à la croisée des chemins. Non pas sur le plan économique ou politique, mais sur le plan éthique. Un glissement progressif, insidieux, mais réel, s’ouvre sous nos yeux. Il ne fait pas de bruit, ne remplit pas les rues, mais envahit les écrans. Il ne se manifeste pas par la violence, mais par la banalisation. Il ne réclame rien… mais emporte tout.
Depuis quelques années – et de manière accumulée depuis la pandémie de Covid-19 – nos écrans, ceux de nos enfants, sont envahis par des contenus révélés sexuels, normalisant la prostitution sous couvert de « liberté d’expression » ou, pire encore, de « contenu divertissant ». Ce phénomène, loin d’être marginal, s’installe désormais au cœur de notre ville.
Certains pseudo-influenceurs et prétendus créateurs de contenu ont franchi la ligne rouge : interviews de prostituées diffusées publiquement, glorification de leur « quotidien », discussion des tarifs et des pratiques… Le tout filmé, monté, monétisé, puis massivement partagé. Le sensationnalisme fait loi. L’indécence devient virale. Et la dignité humaine se retrouve reléguée au second plan, si tant est qu’on y pense encore.
Où sont les garde-fous ? Où est la limite ? Où est la conscience ?
Cet usage dévoyé des plateformes numériques est une forme moderne de traite déguisée. Il ne s’agit plus seulement d’une transgression morale. Il s’agit d’un phénomène qui fragilise le tissu social, mis en danger nos jeunes et trahit l’âme même de Tanger. Car lorsqu’on donne la parole à la prostitution sans recul ni contexte, on ne fait pas du journalisme : on fait du racolage médiatique.
Et les dégâts sont profonds. Ce contenu est consommé à toute heure, par tous les âges. Il s’immisce dans les foyers, façonne les esprits, détruit les modèles. La banalisation de la déchéance devient un modèle de réussite instantanée. Le luxe se vend mieux que la vertu. Le corps devient produit, l’audience devient monnaie.
Ce n’est pas de la liberté. C’est de la complaisance. Et c’est dangereux.
Se taire face à cette dérive, c’est l’encourager. Ne rien faire, c’est devenir complice. Il est temps d’agir avec fermeté, lucidité et responsabilité. La réponse à cette crise morale ne peut être tiède ni hésitante — elle doit être à la hauteur du danger qui nous guette.
Ce que nous demandons est simple, mais essentiel :
- Identifier et sanctionner sans complaisance les chaînes et comptes qui banalisent ou glorifient la prostitution.
- Réguler strictement les plateformes numériques locales ainsi que les créateurs de contenu qui alimentent cette décadence.
- Lancer des campagnes d’information et de sensibilisation à grande échelle, pour éduquer sur les dangers des dérives en ligne, de la cybercriminalité et de la marchandisation du corps.
- Mettre en place un cadre juridique clair et contraignant, qui définit, encadre et pénalise ce type de contenu, en tenant les plateformes responsables de ce qu’elles diffusent.
Ce n’est pas une guerre contre la liberté d’expression. C’est un combat pour la dignité. Pour nos enfants. Pour nos valeurs. Pour notre Maroc et pour notre Tanger qu’on ne doit pas laisser devenir un théâtre d’expérimentations sociales où la morale se négocie à coups de likes.
La responsabilité est partagée : institutions, autorités judiciaires, élus, acteurs de l’éducation, parents, mais aussi les citoyens eux-mêmes. Nous devons reprendre la main sur notre espace, défendre nos valeurs et protéger notre jeunesse.
Tanger mérite mieux. Elle mérite d’être préservée, honorée, défendue. Face à la marchandisation de l’humain, nous devons opposer la dignité. Face à l’indifférence, nous devons affirmer notre vigilance. Et face à l’effondrement moral, nous devons rappeler : nous ne sommes pas à vendre.