Né en 1948 à Tétouan, Mohamed Bouhriz, est un ancien de Ibn Al Khatib qui a rejoint Bruxelles en Belgique pour ses études supérieures. Diplômé de l’Institut supérieur de Coormans en gestion financière, il revient au Maroc où il se lance dans le monde
Il est élu vice président du premier Conseil régional de Tanger –Tétouan, puis président de ce conseil de 2000 à 2003.
Alors que le RNI s’apprête à affronter son 4ème congrès, dans quelques jours, pour élire un successeur à Ahmed Osmane avec les tiraillements entre partisans de Mustapha Okacha, et Mustapha Mansouri, Mohamed Bouhriz, membre du comité exécutif et ‘’poids lourd’’ du RNI au niveau de la région Tanger-Tétouan, soutient ouvertement la tendance Mansouri.
Mohamed Bouhriz est marié et père de 4 enfants.
ENTRETIEN :
Q : Dans quelques jours, le RNI tiendra son 4ème congrès, les 21/22 avril à Rabat. Tous les observateurs soulignent que ce sera un tou
ant décisif pour votre parti. Mais honnêtement : ne pensez-vous pas que Ahmed Osmane, comme d’autres leaders des partis marocains, aurait dû partir il y a bien longtemps ?
R : Il est évident qu’un tel événement constituera un tou
ant important pour le RNI, dans la mesure où il est à la fois, l’aboutissement d’un travail collectif entrepris depuis plusieurs années, et le début d’une ère nouvelle qui sera inaugurée par tous les militants.
Nous voulons que ce congrès débouche sur une nouvelle méthodologie de gestion et d’organisation ; qu’il permette la participation de tous les militants dans la vie du parti, le rajeunissement de l’appareil exécutif et davantage de démocratisation dans les comportements. La volonté générale est d’en finir avec les pratiques basées sur les intérêts et les réseaux de personnes pour mettre en avant les compétences dont regorge le RNI.
Ceci dit, au lieu de se demander si Ahmed Osmane aurait dû partir il y a bien longtemps ou pas, je pense qu’il serait plus convenable de rendre hommage à sa sage décision de passer le flambeau à une autre génération. Ils sont rares les présidents de partis qui ont eu le courage de s’adapter aux nouvelles réalités de l’évolution de leur parti, de leur pays et des pratiques démocratiques.
On se souviendra toujours d’Ahmed Osmane comme d’un grand homme d’État qui a servi son pays dans les moments les plus difficiles.
Q : Le duel Okacha Mansouri, ne risque-t-il pas de créer une division au sein du RNI, à la veille des législatives ? Tout le monde a vu ce qui s’est passé à Béni Mellal entre Mansouri et Hafidi Alaoui…
R : Duel ! Non ! Le terme ne convient pas à la situation à mon sens. Okacha et Mansouri représentent deux tendances qui aspirent à la présidence, qui se respectent mutuellement, et qui défendent chacun, une vision, un projet…Mon grand ami Mustapha Okacha a toujours eu cette vocation de «rassembleur» au sein du parti. Aussi, voudrait-il assumer la présidence du RNI pour une période transitoire, afin de préserver justement l’unité et éviter toute division. Quant à Mustapha Mansouri, son projet s’inscrit dans une démarche où la priorité relève de la restructuration des instances du parti, la réactivation et l’appui des structures existantes, pour qu’elles soient plus efficaces sur le terrain. Cette approche met l’accent sur les compétences, l’effort et le militantisme. Voyez-vous, le RNI est un grand parti qui a besoin de toutes ses tendances et de tous ses adhérents : jeunes, moins jeunes, femmes, hommes, cadres, chefs d’entreprise, étudiants, chômeurs, riches, pauvres…Cependant, la grande priorité est de rajeunir le parti pour pouvoir accompagner l’évolution que connaît le Maroc depuis l’avènement de SM le roi Mohammed VI Venons en maintenant à ce regrettable malentendu de Bénimellal; un incident anecdotique en fait, qui a été relaté médiatiquement d’une manière plus ou moins disproportionnée. Mansouri, dans une interview qu’il a accordée à un quotidien national, a reconnu s’être un petit peu emporté. C’est tout à fait humain. Quoi qu’il en soit, le soir même, Mansouri a dîné chez Alaoui Hafidi. L’incident est clos.
Q : Qu’en est-il de la tendance ‘’séparatiste’’, qui avait fait son apparition il y a quelques mois. Ne craignez-vous pas que Aujjar revienne à la charge après le congrès?
R : Il n’y a pas de tendance séparatiste au sein du RNI. Aujjar est trop intelligent pour s’aventurer dans cette direction, lui qui a participé à l’édification du parti. Il a parfaitement le droit d’aspirer à la présidence, mais il ne prendrait jamais le risque de démolir cette œuvre collective afin de réaliser son ambition, qui, je le répète, est tout à fait légitime. Et il n’en est que trop conscient. Son temps viendra, c’est certain, s’il continue à militer avec cet enthousiasme qui le caractérise.
Q : Où en est le parti avec ses restructurations régionales, au niveau national d’abord, et puis en ce qui conce
e Tanger ?
R : Il y a lieu de reconnaître que ce problème constitue le maillon faible de notre parti. C’est d’ailleurs, comme je vous l’ai dit, ce qui motive la tendance de Mansouri : doter le parti de structures régionales ou locales, là où elles sont inexistantes; renforcer celles qui sont en place en les dotant de moyens pour mener à bien leur mission. Conce
ant Tanger, la structure actuelle sera rétablie, juste après l’élection du conseil national et la mise en place des nouvelles structures centrales, à l’issue du congrès.
Q : Je vais finir par en déduire que vous faîtes campagne pour Mansouri, et non pas pour votre grand ami Okacha…
R : Et vous aurez raison. Mansouri aussi est un grand ami, nous avons grandi ensemble. D’ailleurs ce n’est un secret pour personne. Nous avons tenu une réunion entre parlementaires RNI, au niveau de la région Tanger Tétouan, et avons décidé, à l’exception de Abdeslam Akhomach, de soutenir la candidature de Mansouri.
Q : Le ministre Talbi Alami, lui, est pour Okacha…
R : Oui. C’est son droit le plus absolu et nous ne pouvons en tant que démocrates que nous respecter mutuellement, malgré les différences qui peuvent surgir en pareils moments. Mais, ne soyez pas surpris si, le moment venu, il y a consensus sur l’un des deux Mustapha.
Q : Quelle sera la cote part de Tanger dans ces assises, au niveau des congressistes ?
R : Exactement 67 pour Tanger Assilah et 23 pour Fahs Anjra. La région Tanger Tétouan sera représentée au total par 270 congressistes, sur les 4000 qui constitueront la plateforme générale de ces assises.
Q : Avez-vous tranché dans le choix des têtes de liste et des candidates pour la liste nationale des femmes, ou alors faudra-t-il attendre les résultats du congrès ?
R : En ma qualité de responsable provincial, tout ce que je peux vous dire pour le moment à ce sujet, c’est que j’ai reçu 8 demandes d’accréditation. Celles – ci seront étudiées aussitôt après le congrès et la mise sur pieds des commissions ad – hoc. Pour ce qui est de la liste nationale des femmes, nous avions obtenu quatre sièges aux de
ières législatives. A ce moment là, nous avions convenu de céder plus de place aux régions du centre et du sud du pays. Il est quasiment certain que cette fois-ci, c’est le nord qui sera prioritaire et je pense que l’un des sièges que nous obtiendrons sera certainement occupé par une tangéroise.
Q : Le de
ier découpage électoral, vous satisfait-il ?
R :Oui, il y a lieu de se féliciter de ce réajustement, même si la commune urbaine de Bénimakada, comptant environ 250000 habitants, antérieurement relevant de Fahs Anjra, a été rattachée à Tanger Assilah.
Q : Que faudra-t-il faire, selon-vous, pour que le taux de participation soit significatif ? Les gens se sentent de moins en moins conce
és. Et on en attribue la faute en premier lieu, à tort ou à raison, à vous, c’est-à-dire aux hommes politiques. Qu’en dîtes-vous ?
R : Le taux de participation est motivé par les têtes d’affiche des différents partis en lice. Si les candidats ne sont pas populaires, ou leur profil n’est pas séduisant, déjà il y a un manque d’intérêt. Mais il faut dire aussi que les crispations au sein des grands partis, spécialement ceux de la majorité actuelle, USFP, PI, MP, RNI…, ont un impact négatif sur les citoyens dont une bonne partie finit par adopter une attitude indifférente…
Il serait absurde de ne pas reconnaître la part de responsabilité des partis politiques, dont un bon nombre est absent de la scène, et n’accomplit pas son rôle. Les gens donc refusent de s’identifier à l’un ou l’autre et finissent par mettre tout le monde dans le même sac. Nous au RNI, nous en sommes conscients. Nous allons nous organiser de manière à pouvoir être encore plus proches des gens, de leurs préoccupations quotidiennes, de leurs besoins, leurs craintes…
Mais si nous, nous assumons notre part de responsabilité, l’administration devrait aussi assumer la sienne.
Q : Est-il besoin de vous rappeler que le taux de participation aux communales de 2003 n’a pas atteint les 20% ?
R : La situation en 2003 était différente. L’administration avait fait pression sur le PJD et des candidats d’autres partis pour qu’ils ne se présentent pas. C’est inadmissible. Nous sommes un Etat de droit, et toute décision de ce genre, conce
ant la privation des droits civils et constitutionnels des citoyens, ne devrait se faire que dans le cadre de la justice.
Q : Pourquoi les personnes auxquelles vous faîtes allusion n’ont-elles pas introduit des recours auprès des instances conce
ées ?
R : Je l’ignore. C’est à eux que vous devez poser la question. Moi, je me limite à essayer d’apporter un éclairage sur le contexte des communales 2003, en vous citant l’une des causes, essentielles à mon avis, qui explique la faiblesse de la participation. Il fallait s’y attendre en raison de la popularité, aussi bien du PJD que des personnes qui ont été écartées. La part de responsabilité de ceux qui ont pris cette décision est évidente.
Q : Vous avez une grande expérience électorale. Comment entrevoyez-vous le paysage politique marocain après le 7 septembre ? Pensez-vous que le PJD obtiendra la majorité, comme l’indiquent certains sondages ?
R : Le PJD est un grand parti à l’échelon national, personne ne peut le nier. Mais l’analyse rationnelle de la situation politique ne laisse pas entrevoir une victoire qui permettrait à ce parti d’obtenir la majorité parlementaire. Ni au PJD ni à aucun autre grand parti, pour deux raisons bien connues : la balkanisation du paysage politique, et le mode de scrutin par liste. Le PJD a su redonner à la vie parlementaire ce souffle d’opposition qui s’était évaporé après l’entrée au gouve
ement de l’USFP. L’idéal serait qu’il y reste pour continuer à dynamiser le travail de cette institution.
Q : Le RNI s’allierait-il, le cas échéant, avec ce parti au référentiel islamiste, dans le cadre d’un gouve
ement de coalition ?
R : Le RNI est un parti centriste qui ne tisse ses alliances que sur la base d’un projet commun. C’est ce qu’il a fait par le passé, et c’est ce qu’il fera dans l’avenir, conformément à ses principes qui font prévaloir l’intérêt national. Donc Le RNI est ouvert à tous les partis démocratiques, dont le programme coïnciderait avec le sien.
Q : Franchement, doutez-vous du caractère démocratique du PJD ?
R :Je le répète, le PJD est un grand parti qui a sa vision. L’unique reproche que je lui ferais, c’est de donner cette impression d’avoir le monopole du référentiel religieux. L’islam est un référentiel intrinsèque à notre nation avec toutes ses composantes.
Q : Comment évaluez-vous vos chances au niveau de la Wilaya de Tanger ? Croyez-vous que la tendance USFP à la coupole du conseil de la ville va profiter d’une manière ou d’une autre aux listes de ce parti ?
R : Nous comptons obtenir deux sièges à Tanger ; un à Fahs Anjra, et un à Tanger Assilah. Soyez certains que nous présenterons des profils dignes de représenter les citoyens de Tanger au parlement de la nation. Pour ce qui est de l’USFP. Ce sont nos alliés. Ils sont capables, j’en suis sûr, de trouver les moyens de dépasser les malentendus inte
es.
Q : Sur quels points allez-vous mettre l’accent lors de votre campagne électorale, ici à Tanger ?
R : D’abord nous exposerons les lignes générales de notre programme en insistant sur les points qui préoccupent les Marocains en général…L’emploi, l’éducation, la santé, la justice…etc. Nous consacrerons par la même occasion l’intérêt qu’il mérite, à l’aspect spécifique de la wilaya de Tanger, qui connaît une profonde mutation à travers l’opération de sa mise à niveau. Nous aborderons évidemment les problèmes sociaux, mais sans démagogie ni fausses promesses, sinon, à base d’actions en profondeur sur la voie de l’éradication de tous les maux qui rongent notre société : la pauvreté et tout ce qui gravite autour, l’abandon scolaire, la marginalisation, la drogue…le radicalisme fanatique takfiriste qui trouve dans ces tissus défavorisés la fertilité nécessaire à sa survie. Les tristes événements qui se produisent sporadiquement dans notre pays, comme ceux d’il y a quelques jours à Casablanca et Alger, sont révélateurs. Tout le monde en est conscient. Permettez-moi de profiter de l’occasion pour rendre un hommage bien mérité à nos services de sécurité qui se surpassent dans la lutte acha
ée qu’ils mènent dans le cadre de la lutte antiterroriste.
Q : Malgré votre insistance sur ‘’la fausse alerte’’ suite à l’alarme née d’une éventuelle mesure de suppression des avantages fiscaux de Tanger (Le Jou
al de Tanger du 31 mars 2007 p. 8), certains opérateurs économiques demeurent sceptiques.
R : À moins de vouloir s’entêter sans raison, je ne vois pas pourquoi ils le seraient ! Il est clair qu’une telle mesure ne pourrait être prise, techniquement, que dans le cadre d’une Loi de finances. Puisque l’actuelle Loi n’a pas adopté une telle mesure… ! Il faut attendre la prochaine. Celle-ci sera élaborée par le futur gouve
ement qui sera issu des résultats des prochaines élections. Comment sera ce gouve
ement ? On n’en sait trop rien pour le moment… même si je m’aventure à prédire un retour de la coalition actuelle. Mais quel que soit ce gouve
ement, il ne commettrait jamais la maladresse, pour ne pas dire la bévue, de supprimer ces avantages. Quelle crédibilité aurait-on auprès de investisseurs, étrangers et nationaux, si on décidait de supprimer ces avantages, après les leur avoir vendus pour les faire venir ici à Tanger?! Et puis, je ne vous donnerai aucune exclusivité en vous réaffirmant que SM le roi veille personnellement à ce que ce régime préférentiel soit maintenu pour Tanger.
Q : Le député du PJD, Mohamed Najib Boulif, reproche aux autorités locales de s’être appropriées exclusivement la question de l’Expo de 2012. Selon lui, faire participer les élus locaux et oublier les élus de la nation est une faute de gestion grave qui doit être réparée. Êtes- vous d’accord avec lui sur ce point ?
R : L’expo sera un événement unique en son genre et les profits promotionnels et économiques sont très importants. On a vu comment, rien que la candidature de la ville à l’édition 2012, a pu faire connaître Tanger et ses atouts naturels et économiques, mieux que toutes les promotions touristiques réalisées à ce jour. Ce n’est pas de l’exagération, croyez-moi.
Conce
ant la réflexion de M. Boulif, je suis tout à fait d’accord avec lui. Les élus nationaux ont en effet beaucoup à apporter à cette ‘’cause’’. Pourquoi ne pas les impliquer ?
Entretien réalisé par
ABDEL ILAH ABBAD
abbadabdel@gmail.com