N’est-ce pas un exercice risqué que de vouloir prévoir un avenir imprévisible?
Qui pouvait prévoir, en janvier 2020, à quoi ressemblerait cette année au cours de laquelle le monde a subitement basculé dans le cauchemar d’une pandémie fulgurante et changeante ?
Qui parmi nous avait entendu parler de « confinement », de « gestes barrières » et de « distanciation sociale » il y a tout juste un an ?
Qui aurait pu prévoir les vagues à répétition du Coronavirus? Les lourds bilans de morts par dizaines de milliers? Le bouleversement de la vie sociale ? La chute de l’économie ? Le développement de vaccins en moins d’un an?
Aujourd’hui, ces expressions et ces faits font partie de notre quotidien, tandis que les conséquences de la pandémie du COVID 19 sont devenues omniprésentes dans nos vies, à tel point que des familles devront se résoudre à des compromis et des sacrifices qui risquent de nuire à la santé et à l’éducation de toute une génération.
Dans ces conditions, alors que l’année 2020 s’est éteinte et que nous nous projetons dans 2021, peut-on vraiment conjecturer sur l’évolution de l’épidémie du Coronavirus en cette nouvelle année ? La plupart des scénarios supposés ont un grand risque d’être démentis dans les mois, voire les semaines à venir.
Malgré toutes les incertitudes qui guettent l’humanité, et sans vouloir ni pouvoir prédire l’avenir, essayons d’interroger le futur, dans la mesure des connaissances humaines cumulées durant l’année écoulée. Des connaissances limitées, modestes, incertaines.
A partir de là, les scientifiques du monde pourraient peut-être se prêter à cet exercice, en se basant sur les faits scientifiques accumulés en 2020, mettre en perspective ce que l’on sait du présent, se remémorer les erreurs passées, chercher des moyens de ne pas les répéter.
Ces premières semaines de 2021 sont remplies d’incertitudes. Avant même la question des vaccins, qui ne changera pas grand-chose en ce mois de janvier, la question est surtout de savoir quelle va être l’évolution de la pandémie alors que l’hiver s’abat sur l’hémisphère nord, et qu’une souche mutante a décidé, fin décembre dernier, de venir ternir davantage une année 2020 décidément loin d’être réjouissante.
L’année 2021 s’annonce avec un brin d’espoir dans la campagne de vaccination massive, prônée dans le monde entier. Jusqu’à quel point pourrait-on s’accrocher à ce rai de lumière qui menace de s’éteindre à tout moment ?
Après tout ce qui va suivre dans ce tableau à la fois prometteur et plein de contraintes, nous tenons à souhaiter à nos aimables lecteurs, aux Marocains et à toute l’humanité, une année 2021 clémente et pleine d’espoir pour débarrasser notre planète de ce mal qui a marqué l’année 2020 considérée comme dévastatrice pour l’Humanité !
Sur le plan sanitaire, la pandémie du Covid-19 s’est développée au Maroc, officiellement depuis le 2 mars 2020. En novembre de la même année, le royaume avait enregistré 356 336 cas dont 5 846 décès.
Le Maroc a mis en place des mesures pour contenir la propagation tels que vols aériens et liaisons maritimes conditionné ou interdits ; fermeture temporaire des écoles et dispense des cours à distance ; lancement de capsules d’information et de sensibilisation ; fermeture d’espaces publics comme les cafés, restaurants, salles de cinéma , salles de fêtes, clubs et salles de sport, hammams, salles de jeux et terrains de proximité.
Le 19 mars 2020, un premier état d’urgence sanitaire est proclamé, puis prolongé, empêchant les sorties nocturnes, avec permis de circulation nécessaire et usage obligatoire du masque de protection.
Le traitement des patients atteints de la Covid-19 a été généralisé à la hydroxychloroquine et l’Advaquenil.
Suite à la deuxième vague de l’automne, plutôt que de revenir à un confinement général trop coûteux pour l’économie du pays, le Royaume opte pour la vaccination massive de la population, entre décembre 2020 et avril 2021. Des millions de doses de vaccins des laboratoires Sinopharm et Astra Zeneca ont été commandés et partiellement reçus.
Mais la santé n’est que l’un des vecteurs par lesquels le Covid 19 porte atteinte au capital humain.
Au niveau économique, les mesures drastiques adoptées en 2020 dans le but d’endiguer la propagation du virus et d’atténuer les pressions sur des systèmes sanitaires déjà sous tension et fragiles, ont eu de très graves conséquences sur la croissance.
Le Covid-19 a engendré une crise planétaire sans pareille qui est à l’origine de la pire récession mondiale depuis la Seconde Guerre mondiale.
L’année 2020 a ainsi été marquée par une contraction et une paralysie de l’activité économique qui a durement touché les entreprises, les emplois et les revenus par habitant, ce qui a fait basculer des millions de personnes dans l’extrême pauvreté, sachant qu’une hausse du taux de chômage au Maroc durant le deuxième trimestre 2020, atteignait 12,3 %, contre 8,1 % durant la même période un an auparavant.
Ce déclin a fait craindre aux experts un appauvrissement des ménages, une aggravation de l’insécurité alimentaire et un recul du recours à des services aussi essentiels que les soins de santé, faute de moyens.
Pour tenter de limiter l’impact économique de la pandémie,, plusieurs mesures ont été prises dont la création d’un fonds spécial dédié à la gestion de la pandémie, la suspension du paiement des cotisations sociales, la mise en place d’un moratoire pour le remboursement des crédits bancaires, l’activation d’une ligne supplémentaire de crédit de fonctionnement, le report des échéances fiscales, outre plusieurs mesures en faveur des salariés des travailleurs du secteur informel et des ménages à raison de 800 dirhams par mois pour les ménages de deux personnes ou moins ; 1.000 dirhams par mois pour les ménages formés de trois à quatre personnes et .200 dirhams par mois pour les ménages de plus de quatre personnes.
Côté scolaire, notons que dans les pays à revenu faible et intermédiaire, 53 % des enfants sont déjà incapables de lire un texte simple à la fin du cycle primaire. Cette crise des apprentissages qui sévissait avant la pandémie a encore été accentuée par la fermeture des établissements scolaires, et les effets de la pandémie sur l’éducation risquent de se ressentir pendant plusieurs décennies car, au-delà du recul des acquis scolaires à court terme, ce sont les perspectives économiques à long terme de toute une génération de jeunes qui sont en jeu. Une génération qui, à cause des pertes d’apprentissage et de la hausse des décrochages scolaires, pourrait voir ses revenus amputés tout au long de la vie, outre le fait que cette situation éloignera encore davantage les pays en développement de leurs objectifs de lutte contre la pauvreté des apprentissages.
Aujourd’hui, en ce début de 2021, la question serait de savoir si la campagne de vaccination massive envisagée au Maroc et dans de nombreux pays, va-t-elle changer les données d’expansion de la pandémie, sachant en plus que de nombreuses mutations modifient régulièrement le génome du coronavirus.
En effet, à fin décembre dernier, le monde entier s’est retrouvé les yeux rivés sur un rebondissement de l’épidémie s’imposant au Royaume-Uni à tel point qu’une grande partie de l’Europe a fermé ses frontières.
Du point de vue scientifique, l’impact de cette souche est loin d’être clair, et de nombreux experts craignent que ce variant soit plus contaminant, d’une manière ou d’une autre. Les chercheurs redoublent d’efforts pour analyser en temps réel la situation.
Ce mois de janvier 2021 pourrait permettre de faire, en partie, la lumière sur ces éléments, estimant que si, dans les semaines qui viennent les cas retombent ou restent en plateau, cela pourrait donner espoir.
Par contre, si l’épidémie redémarre en force, alors les hypothèses privilégieront le rôle de l’hiver.
Quelle que soit l’évolution de l’épidémie en janvier 2021, il sera nécessaire, dans les premiers mois de l’année, de tenter d’endiguer la transmission du coronavirus via diverses mesures.
Il ne s’agit pas de compter sur le hasard ou l’évidence car ce sont nos comportements, individuels et collectifs qui écriront l’histoire du coronavirus en ce début d’année 2021. Mais à l’inverse de 2020, un nouvel élément, décisif, pourrait changer radicalement la suite: la vaccination, seul recours, pour le moment, faute de remède approprié contre le virus.
Ainsi, la campagne de vaccination de 2021 devra relever de nombreux défis.
Après une gigantesque course dans laquelle se sont lancés des dizaines de laboratoires, plusieurs vaccins devraient être bientôt déployés. Les données des essais cliniques sont encourageantes. L’efficacité est très importante et s’il existe des effets secondaires légers relativement fréquents, aucun de dangereux n’a été signalé jusqu’à présent ce qui constitue une bonne nouvelle, peut-être l’une des seules sur le plan sanitaire. Mais il ne faut pas croire que la partie est gagnée car, une fois les vaccins présents, le marathon ne fait en réalité que commencer. Dans les premiers mois, alors que des millions de personnes, les plus à risque, sont censées se faire vacciner, il faudra s’assurer que la chaîne logistique fonctionne,
Il faut toutefois admettre que, même si les vaccins répondent à tous les espoirs, même si la campagne se passe parfaitement bien, cela prendra du temps pour protéger la population se situant encore loin de l’immunité collective, loin du seuil à atteindre pour que le virus arrête de circuler et que l’épidémie s’éteigne d’elle-même, à condition que le vaccin bloque effectivement la transmission du virus, dans lequel cas, chaque personne vaccinée nous rapprochera de l’immunité collective.
En attendant, seuls des mesures efficaces dans les comportements individuel et collectif pourront empêcher l’émergence d’énièmes vagues pendant le premier trimestre 2021.
On estime, entre autres, qu’il faudrait s’assurer que les personnes symptomatiques soient diagnostiquées beaucoup plus rapidement pour éviter qu’elles ne disséminent l’épidémie.
Jusque-là, on a imposé le port du masque, des mesures d’hygiène et la gestion des distances, mais ce n’est, malheureusement pas appliqué par tous. Il faudrait que ces mesures soient rigoureusement imposées et s’il le faut pénaliser les récalcitrants comme c’est le cas pour la ceinture de sécurité. Pour cela, il faut aller plus loin, en réinventant rigoureusement la communication de sensibilisation sanitaire.
Bonne et heureuse année 2021 !
Dr Abdelhak BAKHAT