«En Islam, l’Homme et la Femme sont égaux devant Dieu. La Femme, considérée comme le noyau de la Famille et de la Communauté, a tous les droits relatifs à la personne humaine dont le droit au respect et à la dignité, mais aussi au travail et à l’héritage. L’homme ouvre droit a autant de respect et de mérite, vu sa mission aussi noble de subvenir aux besoins de sa famille».
C’est en ces termes que l’on peut résumer, sommairement, la magistrale intervention de l’érudit enseignant-chercheur en études islamiques, le professeur Haj Mohammed Benmoussa de Fès, lors de la rituelle soirée religieuse rotarienne organisée mardi dernier autour du premier ftour-débat de ce Ramadan 1440, organisé au domicile du Past-président du Rotary Club Tanger – Doyen, Abdelhaï Sbaï, auquel ont pris part les membres dudit club, aux côtés d’éminents invités de marque.
Le professeur Hadj Mohammed Benmoussa est, en outre, membre du Conseil des Oulémas et Imam à la mosquée Idriss Ier à Fès, acteur associatif très actif, notamment au sein d’associations de lutte contre les maladies chroniques, comme les affections néphrologiques et le diabète, entre autres, et auteur d’un ouvrage intitulé « L’Islam et la transplantation d’organes ».
Sa magistrale causerie qui avait pour thème « Le regard de l’Islam envers la Femme », a cerné l’ensemble des aspects de la position et de la considération de la Femme, depuis l’ère préislamique, à nos jours.
D’emblée, l’éminent conférencier explique que le Texte sacré de l’Islam évoque, dans sa globalité, l’être humain d’une manière générale, sans précision de genre féminin ou masculin, ne spécifiant ainsi, à aucun moment, le cas de la Femme, hormis lorsqu’il s’agit des Saintes Epouses du Prophète Sidna Mohamed (Paix et Salut sur Lui).
« Si l’une des 114 sourates du Coran est consacrée aux Femmes de manière explicite (la quatrième, dite sourate « An-nissâe »), une large partie du Saint Coran parle de l’être humain ne spécifiant ni Homme, ni Femme » explique le professeur Benmoussa, ajoutant qu’un
passage du Livre Saint est d’ailleurs représentatif de l’indistinction de l’Homme et de la Femme devant Dieu : « Les musulmans et musulmanes, les croyants et croyantes, obéissants et obéissantes, les loyaux et loyales, les endurants et endurantes, les donneurs et donneuses d’aumône, ceux et celles qui jeûnent, les gardiens de leur chasteté et les gardiennes, ceux et celles qui invoquent souvent Dieu : Dieu a préparé pour eux un pardon et une énorme récompense » (Versets 33-35).
Avant de développer les précieux apports de l’Islam pour la Femme, le professeur Benmoussa est remonté dans l’histoire préislamique, révélant qu’à travers les temps, la Femme a essuyé une grande injustice. Elle a été dépourvue de ses droits les plus élémentaires et fut souvent considérée comme inférieure à l’homme autant sur le plan physique, moral qu’humain.
Il aura fallu attendre l’avènement de l’éclosion de l’Islam pour que justice lui soit rendue.
Partant de là, on ne pouvait plus dissocier les valeurs humaines dont Dieu a imprégné aussi bien l’Homme que la Femme qui naissent « d’une âme unique (Verset 4 : 1) » et qui sont considérés comme les meilleurs êtres qu’Allah a placé au-devant de toutes les créatures et l’ensemble des constituants de l’Univers.
« Cependant, eu égard au caractère sacré de la maternité qui est une fonction fondamentale dans la vie de la femme assimilée à un arbre qui vaut par les fruits qu’il porte, l’Islam a conféré à la Femme une place de choix dans la société et l’a suffisamment armée pour s’atteler à cette noble fonction naturelle en sa qualité de mère», dira le conférencier.
Pour illustrer la bénédiction de cette image maternelle, le professeur Benmoussa a rapporté l’histoire d’un homme qui vint un jour chez le Prophète (Paix et salut sur Lui), pour lui demander : « Ô Messager d’Allah ! Quelle est la personne avec qui je dois le mieux me comporter ? ». Sidna Mohammed (PSL) lui répondit : « Ta mère ». L’homme demanda encore: « Et qui encore ? ». Réponse : « Ta mère ». Nouvelle question: « Et qui encore ? ». Nouvelle réponse: « Ta mère ». Dernière question du visiteur: « Et qui encore ? » Dernière réponse du Messager de Dieu (PSL) : « Ton père ». (Rapporté par Al-Boukhari).
Cette histoire explicite démontre que la valeur de la Femme au regard de l’Islam est trois fois supérieure en sa qualité de mère, à celle de l’Homme qui ne bénéficie que de 25%, souligne le Pr Benmoussa.
Une fois le débat ouvert, la nombreuse assistance a posé plusieurs questions au conférencier qui s’est attaché à les développer amplement.
Parmi les sujets qui ont accaparé la discussion, il y a celui de l’héritage tel que défini par l’Islam.
D’aucuns se sont interrogés sur la part de la Femme valant la moitié de celle de l’Homme, entre autres spécificités de la loi coranique sur l’héritage, se demandant s’il y avait une possibilité de jurisprudence (Ijtihad) en la matière.
Rappelons, à ce propos, qu’un appel avait été déjà lancé, il y a quelque temps, au niveau national, par le Dr Siham Benchekroun, médecin, écrivaine et directrice du livre « L’héritage des femmes », en coordination avec le Dr Merieme Yafout, spécialiste en sociologie des religions, sollicitant l’abrogation de l’héritage par voie de « Ta3sib ».
Si cet appel avait obtenu un soutien relatif, il avait été aussi rejeté par des critiques estimant qu’ « On ne peut remplacer la Loi Divine par une loi humaine» au risque de déstabiliser la religion musulmane.
En fait, le «Ta3sib », c’est quoi au juste ?
Le «Ta3sib » est une voie de transmission de l’héritage qui prévoit que de proches parents d’un défunt qui n’a pas de fils deviennent ses héritiers : ceux-ci recueillent alors ce qui reste de la succession après prélèvement des parts d’héritage prescrites.
L’Appel à l’abrogation du Ta3sib concerne deux voies d’héritage :
1- Le « Ta3sib bi-nnafs »(héritiers âsaba par eux-mêmes) qui stipule qu’une fille unique, n’ayant pas de frère, hérite de la moitié des biens de son père, le reste revenant aux proches parents par la lignée du père (oncles, cousins, y compris les cousins lointains). Si elles sont deux filles et plus, elles héritent des deux tiers, le reste allant aux héritiers âsaba.
2- Le « Ta3sib ma’a el ghayr » (héritiers âsaba avec autrui) où ce sont les sœurs du parent défunt qui partagent l’héritage avec les filles. Ainsi par exemple, si un homme décède en laissant une fille et une sœur, sa fille hérite d’une moitié et sa sœur (la tante de l’orpheline) hérite de l’autre moitié. S’il laisse deux filles et plus, les filles reçoivent les deux tiers et leur tante le tiers restant.
Les initiateurs de l’appel à l’abrogation estiment que ces deux types de transmission successorale sont injustes, qu’il s’agisse d’oncles, de tantes, ou de cousins qui viennent partager l’héritage, et usurper ainsi des biens auxquels ils sont souvent étrangers.
Cependant, pour notre conférencier, le professeur Mohammed Benmoussa, « il n’est nullement question d’adopter une loi humaine à la place de «La loi divine sur l’héritage » (AL Ahkam achar’iya fi l’mirath) dictée par Allah et non par les hommes !».
«L’affirmation que tout ce qui concerne les dispositions de l’héritage est un impératif d’ordre divin, qu’il est donc intouchable et n’a jamais connu de changement » , tranchera le professeur Benmoussa, confirmant le caractère inviolable des Recommandations de Dieu et expliquant que l’Islam n’a pas obligé la Femme à travailler à l’extérieur de son foyer et a chargé, en revanche, l’Homme de subvenir aux besoins de la famille. Cette responsabilité de gestion matérielle justifie que sa part de l’héritage soit plus importante afin de sauvegarder l’équilibre des deux pôles de la famille.
D’autre part, poursuit le conférencier, la Femme prodigue une bonne éducation à ses enfants en les guidant vers le droit chemin. Plus elle s’occupe de ses enfants, plus ses relations avec ceux-ci deviennent bonnes et étroites. Ainsi, il est naturel que lorsqu’elle aura achevé sa noble mission, elle aura amplement mérité que ses enfants prennent à leur tour soin d’elle, lui témoignant ainsi leur reconnaissance et leur estime.
Le professeur Benmoussa a poursuivi en définissant, dans le détail, les stipulations concernant le partage de l’héritage selon la loi musulmane.
Ainsi prendra fin la causerie religieuse par une prière élevée au Tout Puissant pour entourer de sa bénédiction l’amphitryon de cette soirée ramadanienne et sa famille ainsi que les illustres hôtes présents et l’ensemble de la Oumma islamique.
Rendez-vous a été pris pour une deuxième causerie religieuse lors de laquelle sera débattu un nouveau thème puisé dans les lois islamiques.
Le professeur Haj Mohammed Benmoussa (à g), enseignant-chercheur
en études islamiques, aux côtés du président du Rotary club Tanger
Doyen, Jalal Sitaleb. Photo : DR