Tanger et sa région menacées par un stresse hydrique sévère
par le Docteur Abdelhak BAKHAT
Le Maroc, où l’agriculture est un secteur crucial, se dirige vers sa sixième année consécutive de sécheresse en raison d’une chute des précipitations ces derniers mois liée aux changements climatiques.
« Au cours des cinq denières années consécutives, le Maroc a subi une vague de sécheresse rude, qui ont réduit les réserves d’eau à des niveaux alarmants. La situation de l’eau au Maroc est critique »,a indiqué le ministre de l’Equipement et de l’Eau, Nizar Baraka, lors d’une conférence de presse tenue jeudi 28 décembre 2023, à l’issue du conseil de gouvernement.
Le ministre a dressé une perspective sombre de la situation expliquant que les précipitations et les températures sont les principaux facteurs à l’origine de la crise. Les trois derniers mois ont été 67% plus secs qu’une année normale, tandis que les températures étaient de 1,30 degrés supérieurs à la moyenne annuelle. Cela a conduit à une évaporation élevée et à un faible afflux d’eau dans les barrages, dira-t-il, précisant que les réserves d’eau dans les barrages se sont élevées à seulement 519 millions de mètres cubes au cours des trois premiers mois, soit une diminution des deux tiers par rapport à l’année dernière et de plus de 50% par rapport à la moyenne des cinq dernières années. Le taux de remplissage des barrages est tombé à 23,5%, ce qui équivaut à 3,7 milliards de mètres cubes.
La crise touche principalement les régions auparavant bien approvisionnées telles que Loukkos, Moulouya, Sebou, Bouregreg, Oum Er Rbia, Al Massira, Tansift, Souss Massa, Draa Oued Noun et Guir-Ziz-Rhéris. Ces régions ont vu leurs ressources en eau diminuer de 50 à 90 % par rapport à leurs moyennes annuelles habituelles. La situation du barrage d’Al Massira est particulièrement désastreuse car il contient moins de 1% de sa capacité.
Pour faire face à cette crise, le gouvernement a pris des mesures pour renforcer le raccordement d’eau entre Sebou et Bouregreg pour desservir les régions de Casablanca et Rabat. Des programmes de dessalement de l’eau de mer sont également prévus à El Jadida et Safi pour réduire la pénurie.
Cependant, le ministre a souligné que la responsabilité de surmonter cette pénurie n’incombe pas seulement au gouvernement, mais aussi à chaque citoyen, dira-t-il, appelant à un comportement de consommation responsable et à l’éradication du gaspillage de l’eau.
M. Baraka a également exprimé l’espoir que des pluies abondantes au cours des trois prochains mois contribueront à inverser la situation, tout en rappelant que la précaution collective et la rationalisation de la consommation restent cruciales pour surmonter cette crise sans précédent.
Face à cette crise hydrique, le gouvernement met en œuvre plusieurs initiatives, notamment l’autoroute de l’eau et la construction ou l’extension de stations de dessalement. De nouveaux appels d’offres sont également prévus en cette nouvelle année 2024.
En parallèle de ces efforts nationaux, la société espagnole Acciona a remporté une victoire significative en obtenant le contrat de réalisation de la plus grande station de dessalement d’eau en Afrique. Ce projet, estimé à 800 millions d’euros, permettra de dessaler quotidiennement 548 000 m3 d’eau, avec une capacité évolutive jusqu’à 822 000 m3, afin de répondre aux besoins en eau de près de 6,7 millions de personnes.
En partenariat avec Green of Africa et Afriquia Gaz, Acciona débutera bientôt la réalisation de cette station.
Cette initiative représente ainsi un rayon d’espoir pour le Maroc, en pleine lutte pour faire face à une crise hydrique sans précédent. La construction de la future station de dessalement de Casablanca et la réalisation de la plus grande station de dessalement d’eau en Afrique démontrent l’importance stratégique accordée par le pays à la sécurisation de ses ressources hydriques pour garantir le bien-être quotidien de millions de personnes.
Un grave stress hydrique menace la région de Tanger-Tétouan-Al Hoceïma
Alors que le contexte de sécheresse se poursuit, la région de Tanger-Tétouan-Al Hoceïma sera indéniablement en proie au manque d’eau, les ressources hydriques s’amenuisant, de plus en plus du fait que le plus grand barrage de la région, celui du 9-Avril, affiche actuellement un taux de remplissage d’à peine 15%.
En tout, ce sont 44 millions de mètres cubes d’eau seulement qui y sont actuellement stockés alors qu’en temps normal, le taux de remplissage de ce barrage dépassait 300 millions de mètres cubes.
Dans le barrage d’Ibn Battouta, autre grande retenue d’eau de la région de Tanger-Tétouan-Al Hoceïma, il n’y a plus aujourd’hui que 8 millions de mètres cubes d’eau, alors que son taux de remplissage habituel était de 30 millions de mètres cubes.
Jusqu’présent, les barrages situés près de Larache ont été mobilisés pour alimenter les réservoirs de distribution d’eau de Tanger, avec l’instauration d’un dispositif de transport de l’eau.
Mais près de Larache aussi, les réserves en eau s’amenuisent actuellement, comme dans le barrage de Khroufa, où le taux de remplissage n’est plus de 15% (avec 80 millions de mètres cubes d’eau en réserve, au lieu de 480 millions de mètres cube d’eau habituellement.
Ce stress hydrique pose particulièrement problème pour l’alimentation en eau de Tanger, ville qui est alimentée à hauteur de 70% par les ressources hydriques du bassin du Loukkos.
Nous ne pouvons qu’insister sur les recommandations du ministre de l’Eau Nizar Baraka qui a souligné que « la responsabilité de surmonter cette pénurie « d’eau » n’incombe pas seulement au gouvernement, mais aussi à chaque citoyen, dira-t-il, appelant à un comportement de consommation responsable et à l’éradication du gaspillage de l’eau ».