Le prix Nobel de littérature 2022 a été attribué à l’écrivaine française Annie Ernaux. L’autrice des « Années », est la seizième Française et la dix-septième femme à recevoir le prix de l’Académie royale des sciences suédoise.
Entamée il y a quarante-huit ans, l’œuvre d’Annie Ernaux, intensément liée à sa vie, s’inscrit de plain-pied dans son temps.
Elle est attentive aussi bien aux grandes problématiques sociales – différence de classes, distinction socioculturelle, revendications féminines… – qu’aux catégories que l’art ou la pensée ont récemment portées à l’avant-scène – questions de la mémoire et du quotidien, de l’héritage et de la filiation. Profondément impliquée dans la discussion de phénomènes littéraires aussi décisifs que le retour du sujet et de l’autofiction, elle participe aux débats que la littérature entretient désormais avec les sciences humaines
C’est à travers « Les années » son chef-d’œuvre, que l’auteur nous peint l’histoire de celle qui dit « elle » et non pas « je ». Le « je » est un point fixe et transparent, en revanche, le « elle », bien qu’extérieur, retrace la perspective de celle qui devient. Annie Ernaux réussit le tour de force d’écrire un récit de vie qui ne soit absolument pas narcissique ni même autocentré. Cette chronique de l’après guerre évoque par petites touches l’évolution de la société française à travers les souvenirs de l’auteur et sa propre expérience. Ecrit à la troisième personne, il porte un regard presqu’extérieur sur la femme qu’elle était.
Une volonté de liberté et de libération anime violemment celle qui déplore que l’individu ne soit désormais qu’un objet de consommation, un pur produit. Car lorsque l’homme est réduit à ce point à n’être qu’un objet commercial, que reste-t-il de son humanité ? L’homme a-t-il encore une conscience et la conscience du monde ?
Annie Enaux a l’art de toucher là où ça fait mal, et on ne lui en veut pas !
Résumé : « La photo en noir et blanc d’une petite fille en maillot de bain foncé, sur une plage de galets. En fond, des falaises. Elle est assise sur un rocher plat, ses jambes robustes étendues bien droites devant elle, les bras en appui sur le rocher, les yeux fermés, la tête légèrement penchée, souriant. Une épaisse natte brune ramenée par-devant, l’autre laissée dans le dos.
Tout révèle le désir de poser comme les stars dans Cinémonde ou la publicité d’Ambre solaire, d’échapper à son corps humiliant et sans importance de petite fille. Les cuisses plus claires, ainsi que le haut des bras, dessinent la forme d’une robe et indiquent le caractère exceptionnel, pour cette enfant, d’un séjour ou d’une sortie à la mer. La plage est déserte. Au dos : août 1949, Sotte ville-sur-Mer ».
Au travers de photos et de souvenirs laissés par les événements, les mots et les choses, Annie Ernaux donne à ressentir le passage des années, de l’après-guerre à aujourd’hui. En même temps, elle inscrit l’existence dans une forme nouvelle d’autobiographie, impersonnelle et collective.
Bonne Lecture !