Tel est le thème de la quinzaine organisée par la ville de Beaugency, du 7 au 23 décembre 2013. Expositions, projections, conférences et musique ont affiché Tanger à La Une. Toute l’équipe de la mairie, avec à sa tête le maire Claude Bourdin, s’est m
Mohamed Mrini : Qui est Claude Bourdin ?
Claude Bourdin : Je suis un « chibani » de 70 ans, élu depuis 42 ans. Elu maire et conseiller général, et réélu à chaque fois au premier tour, donc une réussite certaine dont je suis fier et je ne le cache pas.
Il est donc temps, puisque je crois aux jeunes, de passer la main et de leur permettre de donner un nouvel élan à la chose publique.
Egoïstement, je vais me consacrer à la peinture, parce que je suis aussi artiste peintre. Dès que j’arrête, je me lance dans la concrétisation de mes projets d’exposition, un peu partout en France. Bien sûr, mon rêve est d’exposer à Tanger et je compte le négocier au mois de janvier.
Deux projets formidables qui me rendent serein pour l’avenir, la culture, ma peinture et la solidarité.
Pour commencer, parlez-nous un peu, si vous le voulez bien, du nom « Beaugency accueille Tanger », donné à cet événement.
Chaque année, la ville de Beaugency s’ouvre sur un pays d’Afrique pour mieux prendre conscience que nous sommes dans un monde très divers, avec beaucoup de différences religieuses, culturelles, avec des inégalités aussi, au plan humain, au plan social. Après le Burkina Faso, le Mali, le Rwanda, Beaugency accueille cette année le Maroc et plus particulièrement Tanger.
N’oublions pas que depuis sept ans, la ville de Beaugency est jumelée avec Tanger, plus précisément avec l’arrondissement Tanger-Médina et c’est une grande réussite, une belle expérience, sur le plan culturel, humain, au plan de nos collectivités aussi. Nous n’en avons tiré que beauté et richesse, de part et d’autres.
En quoi consiste cette quinzaine ?
Il y a trois volets pour ces rencontres de cette fin d’année 2013. Le premier est au niveau de nos activités. Je tiens à dire qu’il y a sept ans, les responsables de la ville de Tanger, au plus haut niveau, ont impulsé ce jumelage et le maire de Tanger de l’époque, Derham Dahman, est venu, a été notre invité à Beaugency et nous en sommes très fiers.
Ce partenariat s’appuie sur l’amitié, la concertation entre les élus et, aussi, les fonctionnaires des deux villes. Je tiens à souligner que mon ami, notre ami, puisqu’il est citoyen d’honneur de la ville de Beaugency, Abdellatif Mrini, qui travaille à l’arrondissement Tanger-Médina et ex-président de l’association des œuvres sociales des personnels de cet arrondissement, est la fidèle cheville ouvrière de ce partenariat, des deux côtés de la Méditerranée, à Tanger et à Beaugency.
Pour revenir à cette quinzaine du Maroc à Beaugency, elle revêt deux volets ; le premier est culturel, parce que nous sommes très attachés à ces échanges culturels. La ville de Beaugency a une activité culturelle très forte…
En effet, j’ai pu noter votre vif intérêt pour la culture…
Oui ! Parce que nous croyons à la culture ! Nous croyons à la culture dans cette période de crise, contrairement à beaucoup de pays et à beaucoup de collectivités qui négligent un peu la culture au nom de priorités, l’emploi, les ressources, le niveau de vie des gens…, que je comprends, mais c’est par la culture que nous sortirons de la crise et que nous en sortirons grandis. Donc, ce premier volet est culturel et ce soir nous accueillons un grand groupe musical marocain. Nous allons aussi passer un film qui a été réalisé à Tanger, par le jou
aliste François Olivier Louial, sur la réinsertion des drogués ; un problème universel dois-je souligner.
Le deuxième volet est celui de la solidarité ; solidarité qui est une question universelle. Nous accueillons donc Claire Trichot de 100% Mamans ; cette association accueille et apporte son soutien aux mamans célibataires qui, pour une raison ou une autre, se retrouvent seules avec un bébé sur les bras. A ce propos, il est question de survie, de dignité aussi parce que de réinsertion, une réinsertion qui permettrait à la maman et à son bébé de pouvoir vivre dans une certaine dignité.
De part et d’autre, à Tanger comme à Beaugency, il y a des hommes politiques et des femmes, des responsables aux communes ou ailleurs, des activistes de la société civile, qui croient fermement à la dignité humaine et qui partagent cette volonté, cette action, entre d’autres.
Et nous le faisons dans le respect de la culture et de la souveraineté de notre ami le Maroc.
On dit de vous le Tangérois balgencien ou le Balgencien tangérois…
Oui, je suis un amoureux du Maroc. Nous sommes dans mon bureau de maire et vous le voyez, sur mon bureau il y a trois drapeaux, le français, l’européen et le marocain. Au-dessus – et là, c’est mon cachet tangérois – il y a une magnifique vue panoramique de Tanger.
Je suis un humaniste, un enfant d’Albert Camus, l’enfant d’un père ami de Mendès France qui a fait beaucoup pour l’indépendance de la Tunisie et qui aurait continué dans d’autres pays dans le respect de la liberté et de la vraie démocratie.
Il y a quarante cinq ans, nous avons eu, mon épouse et moi, avons eu une expérience de coopération qui nous a beaucoup marqués et je me suis engagé dans la vie publique, non par ambition ou par intérêt, mais pour contribuer à permettre les conditions de bonheur partout dans le monde. Ce que je fais, avec conviction et passion, pour cette amitié qui est franco-marocaine, nous le vivons avec un grand bonheur.
Quand on voit la façon dont on est accueillis, partout dans le Maroc et par tout le monde, quand on voit ce peuple fier et digne, très généreux, qui tend les bras aux Français, je me dis que la France et ses élus doivent, aussi tendre la main à ce pays qui est en pleine évolution, qui a des potentialités énormes au plan humain, au plan culturel ; un pays qui a un patrimoine d’une extrême richesse.
Et c’est dans la famille, mon épouse, mes enfants, mes petits enfants, c’est le grand amour et le grand respect pour ce beau pays.
Que diriez-vous du projet « Tanger-Métropole », lancé de
ièrement par Sa Majesté le Roi ?
Enfin les plus hauts responsables marocains – au plus haut niveau – ont compris l’enjeu majeur que représente la ville de Tanger. Tête de pont entre l’Afrique et l’Europe, entre la Méditerranée et l’Atlantique, Tanger est une ville qui a un patrimoine, un passé, un potentiel, formidables. Au plan humain, c’est une ville cosmopolite où tout le monde se sent bien, quelles que soient les convictions, la philosophie, les religions, les cultures. C’est une ville qui a des acquis au plan économique. Le fait donc de voir les Européens et les Américains investir au Maroc me plaît beaucoup, plutôt que de les voir investir ailleurs, beaucoup plus à l’Est…
N’y voyez-vous pas un risque de défiguration de la ville ?
Il y a six ans, quand je suis allé à Tanger, le maire Derham Dahman, m’avait demandé de faire une étude avec un architecte de bâtiment de France sur la restauration des remparts de la Kasbah. Est-ce dire que de tout temps les responsables de la ville ont tenu et tiennent compte de ce risque.
A ce sujet, je sais que Sa Majesté le roi a décidé d’impulser un programme pour la restauration de ces sites et a donné ses instructions pour que les responsables, à tout niveau, y veillent méticuleusement.
Tanger a beaucoup changé et elle continue dans ce sens. Au fait il s’agit d’un pari ; le pari de restructurer tout le bord de mer de cette charmante ville. Je suis sûr que ça sera une réussite, tout en sachant, également, que ça pose un problème d’urbanisme. J’ai beaucoup suivi l’action de Rachid Tafersiti qui, lui-même, a évolué, a changé en fonction de ces grands projets et de leur vision.
Ce dont je suis certain, c’est que Tanger ne deviendra jamais ce qu’est – malheureusement – la côte andalouse où l’on a détruit le patrimoine urbanistique et paysager.
Tanger restera Tanger, la belle Tanger, avec beaucoup d’amis dans le monde et les actuels projets ne feront que lui rendre ce qu’elle mérite, la prospérité, sans en changer le cachet culturel et quelque peu mystique…. Le fameux cachet tangérois, quoi !
Propos recueillis par
Mohammed Mrini