Une commission parlementaire en visite à Fnidek
Dans notre avant-précédente édition, nous avions soulevé l’évolution de la situation de crise à Bab Sebta et les répercussions de cette situation évolutive sur les milliers de familles et les centaines de commerces qui vivent des activités de contrebande dans le nord du Maroc, et nous nous étions demandés ce qu’était devenu le projet depuis longtemps remisé dans les tiroirs, du projet alternatif de création d’une zone franche commerciale à Fnidek, pour relayer les activités de contrebande vivrière, très active à partir du préside occupé de Sebta.
Rappelons que la situation qui prévaut aujourd’hui à Bab sebta, ne manque pas d’avoir un impact sur les échanges commerciaux déjà ressenti auprès des commerçants de Sebta dont l’activité est réduite en l’absence de touristes marocains, sachant que l’accès au préside occupé devient de plus en plus difficile et des contrôles sévères à la sortie et des restrictions sur les achats sont imposés par les autorités marocaines.
En fait, la crise remonte à plusieurs mois déjà lorsque le passage Tarajal situé au poste frontalier séparant le territoire national du préside occupé a été fermé à maintes reprises à cause de l’ampleur du trafic de contrebande et du désordre causé par les centaines d’hommes et de femmes-mulets sillonnant quotidiennement ce passage dans des conditions inhumaines, transportant de lourds fardeaux sur leur dos, au point que certaines ont perdu la vie dans la bousculade.
Les autorités marocaines et espagnoles se sont toujours rejetés la responsabilité de ce désordre, jusqu’au jour où l’on a décidé d’agir.
Le renforcement de la barricade frontalière de part et d’autre a un double-objectif : d’abord mettre fin à la situation dramatique du passage Tarajal, ensuite freiner l’immigration clandestine, ce que semble apprécier et encourager l’Union Européenne.
Cependant, cette nouvelle situation crée un malaise, d’une part chez les hommes et les femmes « mulets » qui se plaignent de la fermeture de ce passage, et d’autre part, chez les commerçants dépositaires des produits de contrebande surtout à Tétouan et à Tanger, mais aussi à Larache, El Ksar El Kébir, voire à Casablanca, où les produits clandestins sont acheminés journellement, sachant que ce trafic incessant tourne autour de 730 millions d’euros par an
Aujourd’hui, nous apprenons que la commission parlementaire, qui avait été dépêchée au point de passage de Baba Sebta et à Fnidek, afin d’examiner la situation de femmes marocaines qui s’adonnent chaque jour à cette forme de trafic de marchandises en provenance de Sebta ainsi que les incidences de ce phénomène sur l’économie nationale a enfin dévoilé son rapport débattu mardi dernier lors d’une réunion de la Commission des Affaires étrangères, de la défense nationale, des affaires islamiques et des MRE, à la Chambre des représentants.
Dans ce rapport, ladite commission dénonce les conditions inhumaines de passage au niveau du poste-frontière. Là où des « porteuses » peuvent passer « trois nuits » consécutives « à découvert » sur une file qui s’étend sur des centaines de mètres, avec des « risques de maltraitance, harcèlement, vol ou maladies » que cela implique.
Le rapport déplore « la fermeture permanente de l’unité médicale » établie sur le point de passage. Seule la présence, sur place, de « la Fondation Mohammed V pour la solidarité » limite les conséquences résultant d’une telle situation.
Les membres de la mission ont constaté de visu des cas de « mauvais traitement », de « violences verbales », « d’insultes et d’injures » à l’égard de femmes-porteuses de marchandises. Agents des douanes et de la sûreté font l’objet de «plaintes récurrentes » en ce sens, et « deux noms » précis ressortant avec insistance auprès des personnes sondées par les députés.
En attendant la mise en œuvre de mesures palliatives dont celui de la création d’une zone commerciale franche à Fnidek, un projet qui ne date pas d’hier, afin de lutter contre la contrebande vivrière en provenance de Sebta, on préconise la mobilisation immédiate de ressources humaines qualifiées en vue d’humaniser et d’organiser de façon optimale le passage de Bab Sebta, tout en mettant en place des moyens électroniques d’organisation pour maîtriser les flux sur place et améliorer les conditions de santé et d’hygiène dans l’attente de solutions durables.
Parallèlement,, le rapport plaide pour une véritable alternative économique, offrant, à terme, des avantages incitatifs pour les activités génératrices d’emplois dans la zone, et au lancement, à moyen terme, d’une zone industrielle susceptible d’absorber les femmes et les hommes qui s’adonnent à la « contrebande vivrière ».
S’exprimant devant la commission, la ministre de la Solidarité, du développement social, de l’égalité et de la famille, Jamila El Moussali, a souligné que le débat sur la situation des enfants négligés et des femmes-mulets au point de passage de Bab Sebta intervient dans un contexte marqué par la mise en œuvre de la régionalisation avancée et la signature du cadre d’orientation pour l’exercice des compétences des régions.
Le phénomène de la « contrebande vivrière » est éminemment complexe dès lors qu’il revêt des dimensions à la fois économique, sociale et culturelle, estime-t-elle, appelant à la promotion de la formation professionnelle afin de favoriser l’autonomisation des femmes porteuses de marchandises, dont le nombre s’élève à quelque 3500 de différentes tranches d’âge.
Après avoir mis en évidence la dynamique que connait le domaine des coopératives au Maroc, particulièrement dans sa région du nord, la ministre a évoqué les multiples avantages qu’offrent le Fonds de cohésion sociale et le fonds d’entraide familiale.
Par ailleurs, elle a fait état de la volonté politique en faveur de la promotion de la situation de la femme, citant une série d’actions entreprises visant le renforcement de l’autonomisation de la femme et l’amélioration de sa condition.